Varadero

Aux premières lueurs du jour, dans un silence à peine rompu par le chant des moteurs, quelques « llaüts » quittaient les refuges terrestres pour une cueillette marine qui s’avérait souvent largement suffisante pour nourrir la famille. Les anciens avaient profité de ces anfractuosités côtières pour mettre barques et outils à l’abri des vents et des violentes houles qu’ils suscitent parfois. Dans les Pityuses (Ibiza, Formentera), la menace estivale venant généralement de l’Est et les fureurs hivernales de l’Ouest, il n’était pas rare qu’un même pêcheur disposât d’une barque de chaque côté de l’île. Ces lieux avaient le goût du sel, l’odeur du poisson et la couleur de la solidarité. Ils avaient aussi la saveur des départs et des retours, la magie des temps suspendus, des discussions à l’ombre des « casetas » protégeant des assauts mordants du soleil. Ces lieux étaient des liens : entre la terre et la mer, entre les générations, entre les amoureux du large…

Les regards des pêcheurs traditionnels, leurs gestes, mots et silences sont souvent des œuvres. Les « Varaderos », ces cabanes abritant leurs embarcations le sont aussi. Elles sont d’improbables constructions de bois, pierres ou tout autre matériau de récupération qui témoignent d’un art subtil du bricolage et qui ponctuent le littoral comme autant de lieux de repli possibles.

Leur patrimonialisation officielle depuis 2002 est à la fois le symbole d’une nécessaire reconnaissance et le signe de la fin d’un temps…